HDR Philippe CAMPILLO

Vendredi 5/10/2018, Amphi Delapille - 9h00

Évolution historique et épistémologique de l’étude du mouvement
Exemples de quelques filiations théoriques et pratiques de l’animal à l’homme, vers la
performance sportive

jury: D. Delignières, P. Pelayo, L. Robène, B. Andrieu, D. Chollet, O. Sirost

 

Ce travail de synthèse, s’articule en quatre parties, autour d’auteurs et d’oeuvres majeures, qui
marquent de leurs références les époques et constituent le moyen de suivre par leurs filiations
épistémologiques et historiques, entre éclectisme et organon, les concepts, les théories et les méthodes,
la compréhension de l’étude du mouvement, et notamment la locomotion selon une perspective
biomécanique.
Ces études s’échelonnent au cours d’une difficile odyssée qui pourrait commencer depuis le petit
traité d’Aristote sur la Marche des Animaux. L’interprétation de la locomotion se situe dans un
encyclopédisme zoologique culturel à la croisée de plusieurs modes de pensée et de systématisation des
sciences, combinant déjà une démarche anatomo-fonctionnelle biologique avec une vision mécanique
du mouvement. La méthode se réfère déjà à des notions et des principes, utilisés ou supposés, comme :
le repère spatial, les points d’appui, la répartition des masses, le centre d’inertie et de gravité, les modes
de déplacement en flexion et extension ou traction et poussée, qui restent toujours d’actualité dans
l’explication de l’étude des mouvements.
C’est à la fin du XVIIe siècle qu’un disciple de Galilée, Giovanni Alfonso Borelli, analyse
l’économie animale en se référant au patrimoine scientifique de ses prédécesseurs sur les lois de la
statique, de l’hydraulique, des mathématiques, mais aussi des connaissances anatomiques et
physiologiques, pour rédiger l’oeuvre de sa vie, le De Motu animalium. Illustrant ses propositions de
nombreuses figures, il démontre que les os s’actionnent selon la mécanique du système des leviers
(appui, longueur du segment, résistance, force) dont les muscles représentent des puissances mal
agencées, engendrant d’énormes déperditions de forces, qu’il s’efforce de calculer et de chiffrer au cours
de différentes postures et quelques mouvements. Malgré, l’imprécision des calculs iatromathématiques,
sa démarche à valeur d’étape et d’exemple, car génératrice de curiosités et d’intérêts critiques.
Plusieurs siècles après, La machine animale de Marey, publiée en 1873, révèle encore des
filiations récurrentes avec le courant iatromécanique. Sa passion pour l’ingénierie et la physiologie guide
sa logique matérialiste sur de nouveaux champs disciplinaires dont les passerelles élèvent le niveau
conceptuel et théorique. Il s’intéresse aux estimations de l’efficacité et du rendement des moteurs animés
depuis les lois de l’économie d’énergie et du travail qui le guide à la biomécanique. D’autres auteurs,
plus récents, McNeill Alexander, Bejan... selon de nouveaux modèles cohérents, enrichissent cette
vision pluridisciplinaire et multiculturelle pour élaborer des modélisations de plus en plus rigoureuses
et globalisantes.
L’évolution des performances sportives représente le champ de recherche qui montre au mieux,
l’influence et les progrès de la technologie dans l’optimisation de l’étude du mouvement. Les quelques
exemples appliqués et évoqués, révèlent la quête du sens dans les variables étudiées, elle interpelle
toujours par filiation éclectique la sémiotique de l’argumentation aristotélicienne, la iatromathématique
Borellienne, l’ingénierie physiologique de Demenÿ et Marey et d’autres multiples théories et
modélisations physico-mathématiques dont l’histoire des sciences est riche.
Les recherches historiques sur les théories explicatives de la locomotion expriment, et cela de
manière récurrente, quels que soient les contextes et les paradigmes scientifiques biologiques
interprétatifs, que le matérialisme se heurte au caché insaisissable. Le mystère de la vie transparaît dans
ce qui se meut et les méthodes de quantification donnent sens à l’intensité et l’efficacité du vivant. Les
multiples courants de pensée, autrefois d’appellation physiologique et physique puis iatrochimique et
iatromathématique, il y a peu encore biologique et biomécanique s’intitulent aujourd’hui
neurophysiologie et neurobiomécanique pour s’intéresser toujours aux mouvements, indirectement aux
paramètres de la connaissance de la maîtrise de la vie pour son prolongement, mais toujours avec sa part
d’insoupçonnée.
Mots-clés : éclectisme, épistémologie, histoire, locomotion, mouvement, science, technique